C’est un peu plus compliqué, en fait. Grosso modo, la plupart des chocs du genre « je tombe sur un cadavre bien crade tout à coup » imposent des jets avec une difficulté relativement faible (11 ou 14). La vision de bestioles bizarres genre feondas est déjà un peu plus costaude (14 minimum, la première fois). C’est juste une base pour les trucs les plus fréquents, mais vous allez vite voir qu’en se penchant là-dessus, on a vu venir une sacrée pelote de laine.
En effet, on a plein de variables qui peuvent entrer en ligne de compte. Par exemple, je suis un guerrier, bon, ben si les feondas sont toujours aussi choquants, c’est pas de voir des tripes à l’air qui va me retourner comme la première fois, alors que le magientiste, là, à côté, par contre… mon jet ne sera pas le même que le sien.
Mais à l’inverse, je suis un magientiste, et j’arrive dans un labo ou je vois un confrère vivant et anesthésié, dont on a ouvert le corps pour y insérer des mékônes (les veines de Flux artificielles). Ca n’a rien d’anodin, et si c’est ma première fois, je serais sans doute choqué. Si je suis Vitaliste, sans doute déjà moins. Mais en tous cas, imaginez la tête du guerrier qui m’accompagne, lui qui se vante de voir de la tripaille et qui regarde des types masqués en train de foutre des tubes dans le corps d’un gars vivant… Et alors, le demorthèn du groupe qui voit le corps comme sacré, je vous dis pas la tronche qu’il va faire, lui… si je fous du flux dedans avec des veines en plastoc sous ses yeux…
Mais là encore, un PJ pourrait dire « ah, mais mon magientiste, tu sais bien qu’il a horreur de tout ce qui concerne le sang » ou « mon demorthèn considère que si c’est pour sauver une vie, bien que ça le défrise, c’est une forme de médecine douteuse, c’est tout. Comme la science magientiste est indéniablement utile en général, mais qu’ils en font n’importe quoi le plus souvent, quoi ». Là, déjà on décline pas mal les choses.
Autre variable : je vois le corps d’un inconnu qu’on a atrocement torturé avant de le tuer. C’est certes choquant. Mais si c’est mon frère et pas un inconnu ? ca l’est encore davantage…
En fait, le système est assez contextuel. On va pas aller jusqu’à dire « à chaque PJ son jet de résistance mentale individualisé selon son background et son vécu », on ferait des tableaux à n’en plus finir (ça me rappelle trop le « à chaque clan ses pertes d’honneur spécifiques selon la vertu spécifique du bushido que le pj enfreint» à L5a… le résultat n’a jamais été autre chose que peu convaincant, ouvrant la porte à plein de contestations et des arguties sans fin) mais on est plutôt dans l’idée de « si le joueur se comporte comme on peut l’attendre de son personnage, pas de jet, sinon, il en fait un ». D’autant que le système de santé mentale est proposé comme central mais en même temps optionnel pour ceux qui ne veulent pas trop forcer cet aspect du jeu. Donc, on va dire que plus un joueur s’écarte des réactions que son personnage devrait avoir et plus l’évènement devrait par sa nature justement provoquer une réaction, alors, plus la difficulté du jet proposé sera majorée… c’est le principe de base.
Au fur et à mesure, on vous donnera des exemples précis de mise en situation (et de difficultés) de la résistance mentale, à travers les canevas, scénarios et bestiaires notamment. Mais je ne pense pas qu’on ira jusqu’à créer une matrice de résolution croisée nature du choc/psychologie du personnage ou quelque chose du genre et en même temps, on voulait pas non plus une même table de progression pour tout le monde avec juste la question de savoir si ton PJ est plus ou moins résistant que la moyenne. On a donc creusé autour du concept de « chacun ses faiblesses » qui prédispose donc le PJ à certaines choses plus qu’à d’autres, mais on aurait pu écrire deux cent pages de plus autour de ça sans forcément être plus explicite, ou surtout, plus pertinent. De même, on a évité des choses intéressantes comme les vertus de Pendragon par exemple, parce que ça semblait surcharger le système de considérations dirigistes « j’ai tel score dans tel truc, donc je fais ça » alors que rien que les cinq Voies et ce qui en découle en termes de construction ont tendance à déjà offrir pas mal de bornes aux joueurs pour définir comment leur PJ se comporte. Et, surtout, qu’on voulait en rester à un système aussi léger et simple que possible.
A l’heure actuelle, nous n’envisageons pas vraiment de règles plus détaillées et spécifiques, en termes de système général de gestion de la santé mentale, parce qu’on a surtout fait des playtests courts. On n’a pas encore mesuré sur le long terme et la diversité des situations concernant un même personnage l’impact de la gestion Santé Mentale, genre après dix ou quinze séances avec le même perso, déjà. A ce niveau là, comme en termes de progression de personnages, on est dans la même situation que les autres concepteurs de jeu : on est encore bien plus dans la prospective que le constat riche et instructif.
En fonction de vos retours et expériences, et puis des notre dés qu’on aura un peu de temps pour maitriser des trames maison récurrentes et pas seulement faire des playtests et des démos, on aura l’occasion de brainstormer un peu tout ça par chez nous